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1 mai 2008 4 01 /05 /mai /2008 15:40

Toute la famille était là. Le navarin et la tarte à la crème engloutis, le four micro-onde nettoyé et renettoyé (mon cher mari a eu la bonne idée de faire cuire un oeuf dur dedans), je me suis replongée dans Pennac. Un œil sur les lignes et un autre sur mon environnement, j'attends.....YESSSS, ils sont tous sortis à leurs occupations. Aussitôt la maisonnée vide, Pennac est laissé à sa philosophie et je grimpe quatre à quatre les escaliers pour assouvir ce nouveau vice: LE BLOG. Aller pondre sa bafouille, chercher des images, aller voir chez les autres ce qu'ils racontent. C'est honteux mais je ne résiste pas !! (hi hi !!). C'est pas  que j'ai de nombreux lecteurs, au maximum vingt par jour mais c'est comme ça.

Neandertal a laissée Lascaux alors pourquoi pas moi?


Je disais donc Pennac, oui, qui réveille mon inconscient : "Cette enfance-là n'était pas drôle, et s'en souvenir ne l'est pas davantage. Impossible de s'en flatter. Comme si l'ancien asthmatique se vantait d'avoir senti mille fois qu'il allait mourir d'étouffement! Pour autant le cancre tiré d'affaire ne souhaite pas qu'on le plaigne, surtout pas, il veut oublier, c'est tout, ne plus penser à cette honte..."

 

Daniel Pennac parle longuement de son enfance de cancre

Une douleur dont il est difficile de se remettre."Le chagrin d'être cancre relève du chagrin d'amour. Le cancre a le sentiment d'être profondément inutile, donc indigne d'amour. " "Revenir sur cette enfance", n'a pas été une promenade de plaisir. Il m'a fallu quatre ans pour écrire ce livre, qui semblera peut-être du "Pennac" souriant, avec des anecdotes amusantes, etc. Mais de sentir remonter en mois ces journées interminables, les cours où je ne comprenais rien, les leçons que je ne retenais pas, les devoirs sur lesquels je séchais, non, ça n'a pas été drôle". Le cancre, c'était lui, "Daniel Pennacchioni...Fils d'un polytechnicien et d'une mère au foyer. Elevé dans une famille aimante et cultivée, dernier de quatre garçons dont les trois premiers ont fait de bonnes études". Comme il arrive parfois, l'élève Pennac a été "sauvé" de sa "cancrerie" en troisième, par un professeur de français. Celui-ci lui a demandé non une dissertation, mais un roman, que le jeune Daniel livrait, chapitre par chapitre.

 Se remet-on d'avoir été mauvais élève ? Pas aisément, même si on le dissimule "par une attitude désinvolte" ou "de joyeux récits à posteriori". En 320 pages, l'ancien dernier de la classe devenu enseignant et romancier à succès raconte son désarroi et son calvaire passés, cet avenir "réduit à rien", l'angoisse des parents. Il y ajoute un message : "pour se sauver à ses propres yeux, le cancre doit s'apercevoir qu'il existe aux yeux des adultes, qu'il a de la valeur pour eux. Et pour ce faire, il faut qu'il sente un certain amour dans la transmission du savoir : l'amour du professeur pour la matière qu'il enseigne, son intérêt réel pour sa classe et pour chaque individu à l'intérieur de cette classe, fût-ce le plus nul".

 

Je ne peux m’empêcher de vous rapporter ce savoureux plat :


Pennac en tant que prof fait apprendre à ses élèves un texte par coeur par semaine à ses élèves. Il répond à une mère qui lui dit que son fils n'est plus un bébé:

" Votre fils, chère madame, n'en finira jamais d'être un enfant de la langue....il aimera savoir en quelle langue il nage, ce qui le porte, le désaltère et le nourrit, et se faire lui-même porteur de cette beauté, et avec quelle fierté! Il va adoré ça, faites-lui confiance, le goût de ces mots dans sa bouche, les fusées éclairantes de ces pensées dans sa tête, et découvrir les capacités prodigieuses de sa mémoire, son infinie souplesse, cette caisse de résonance, ce volume inouï où faire chanter les plus belles phrases, sonner les idées les plus claires, il va en raffoler de cette natation sublinguistique lorsqu'il aura découvert la grotte  insatiable de sa mémoire, il adorera plonger dans la langue, y pêcher les textes en profondeur, et tout au long de sa vie les  savoir là, constitutifs de son être, pouvoir se les réciter à l'improviste, se les dire à lui même pour la saveur des mots. Porteur d'une tradition écrite grâce à lui redevenue orale il ira peut-être même jusqu'à les dire à quelqu'un d'autre, pour le partage, pour les jeux de la séduction, ou pour faire le cuistre, c'est un risque à courir. Ce faisant il renouera avec ces temps d'avant l'écriture où la survie de la pensée dépendait de notre seule voix. Si vous me parlez régression, je vous répondrai retrouvailles! Le savoir est d'abord charnel. Ce sont nos oreilles et nos yeux qui le captent, nos bouches qui le transmettent. Certes, il nous vient des livres, mais les livres sortent de nous. Ça fait du bruit une pensée, et le goût de lire est un héritage du besoin de dire".

 

…et le goût de lire est un héritage du besoin de dire

 

Je me dit à nouveau : « Neandertal a laissée Lascaux alors pourquoi pas moi? »

C’est donc ça. Je me rassure, j’ai un bon vice !!




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commentaires

S
Coucou, Marie-Reveuse! J'ai trouvé ton blog grâce à Emmanuel et je ne regrette pas ma visite.Pennac fait partie de mes auteurs favoris. Aussi passionnant à lire qu'à écouter, c'est un écrivain qui touche droit au coeur, qu'il décrive la désopilante famille Malaussène ou qu'il nous parle de ses chagrins d'école ou du Vercors qu'il rend envoûtant.Merci de lui rendre hommage ici!J'ai appris qu'il était fort demandé dans les lycées: quel bonheur pour tous les enfants, cancres ou non.Merci à toi, je reviendrai te voir!Suzette
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M
<br /> Et bien, quel engouement! Tout comme toi, dès que je sais qu'il passe sur les ondes, je ne le rate pas. Je n'ai pas encore eu l'occasion de faire connassance avec<br /> la famille Malaussène....je prends note.<br /> Au plaisir de te revoir Suzette....ça tombe bien, j'adore le crêpes!!<br /> <br /> <br />